Campaigning for the Protection and Promotion of Human Rights, Democracy, the Rule of Law and International Justice

Le Dictionnaire des MGF
Le Guide des MGF: Campagne pour l'éradication des MGF
Index:
- Première Partie: Les MGF dans le Monde
- Deuxième partie: Les MGF dans les pays d'origine
- Troisième partie: Les MGF dans les pays d'immigration
Préface
Il y a un quart de siècle à peine, la loi du silence régnait sur le sujet. Les mutilations génitales féminines frappaient alors une trentaine de millions de femmes africaines, mais personne ou presque ne se préoccupait de savoir quelles réalités renfermait le terme d’excision. C’était un mot pour ethnologues, plus que pour militants.
Il y a vingt ans, une majorité de l’opinion africaine frappait d’opprobe les femmes – africaines d’abord puis occidentales qui les soutenaient – osant s’élever contre une pratique aussi vieille que l’histoire du continent. Critiquer les MGF, c’était alors attenter aux traditions, détruire l’identité de peuples entiers. La souffrance des femmes ne pesait guère devant ces arguments. Chargées depuis les temps immémoriaux de porter le signe identitaire de leurs communautés, elles devaient sans mot dire offrir leur sexe à la sauvegarde de la « personnalité » africaine.
C’est peu dire qu’on a changé d’époque. Certes, les MGF se pratiquent toujours dans le secret des cases et la majorité des filles de nombre de pays y sont encore soumises. Certes, l’infibulation – la forme la plus radicale de la mutilation génitale – est encore massive dans la corne de l’Afrique. Mais en vingt ans, les MGF sont devenues moralement indéfendables. Cette première et immense victoire en a entraîné une série d’autres : partout, elles sont devenues un sujet dont on parle, elles font débat au sein des sociétés. Les femmes, les praticiens de la santé, les chefs traditionnels, les religieux prennent de plus en plus position pour dire que rien ne les justifie. Au nom de la santé des fillettes ou de la dignité des femmes, les exciseuses du Sénégal, du Burkina, de Guinée, déposent solennellement leurs couteaux. Presque tous les pays concernés ont mis au point des programmes d’élimination d’une pratique dont on peut dire aujourd’hui publiquement qu’elle est dangereuse pour la santé et attentatoire aux droits fondamentaux de la personne humaine.
En un quart de siècle, le chemin parcouru est immense, même si certaines le trouvent à juste titre encore trop court. Car, enfin, depuis une dizaine d’années, « les droits des femmes sont des droits de l’homme » comme le clamaient des militantes venues du monde entier lors de la Conférence des Nations unies sur les droits humains réunie à Vienne en 1993. Or, depuis la fin de la guerre froide et de l’affrontement entre les blocs, la bataille pour « tous les droits de tous » a acquis droit de cité dans les relations internationales, même si ces droits sont systématiquement violés par les régimes les plus brutaux et cyniquement instrumentalisés par les Etats les plus puissants. Il n’empêche. On ne peut plus aujourd’hui contraindre leurs défenseurs à se taire.
Le combat pour l’abolition des MGF fait partie de cette bataille. Grâce à des centaines de femmes et d’hommes qui, partout en Afrique, consacrent leur vie à rendre leur dignité aux femmes, il est devenu impossible de parler des droits humains sans aborder le premier d’entre eux : le droit à l’intégrité de son corps.
On sait que, dans le monde entier, les femmes ont encore fort à faire pour acquérir des droits qui leur permettraient d’avoir dans la vie les mêmes chances que les hommes : le droit à la santé, à l’éducation, à l’égalité de traitement professionnelle, à la responsabilité politique, restent bien injustement répartis entre les sexes. Au Sud, comme au Nord de la planète, les femmes sont encore trop souvent des handicapées sociales et politiques. Là où elles existent, les MGF ne sont-elles pas, au fond, une métaphore paroxystique du sort réservé au sexe qu’on dit « faible » pour éviter de reconnaître qu’il est dominé ?
Les choses, en tous cas, bougent. Toutes les données recueillies récemment dans les pays concernés indiquent que la pratique des MGF recule. Trop lentement peutêtre, mais le mouvement est lancé et rien de pourra désormais l’arrêter.
Ce petit guide rend compte de l’ampleur de ce qui reste à faire pour que, d’ici une quinzaine d’années au plus, les MGF soient remisées au musée. Sans prétention à l’exhaustivité, il veut être un outil d’information et de travail pour les non spécialistes qui s’intéressent à cette question et qui veulent savoir. Travail modeste, il veut aussi être une contribution au combat plus que jamais nécessaire pour accélérer la tendance au recul des MGF. Et il est dédié à tous ceux et celles grâce auxquels ce recul est enfin amorcé.