La CPI, Cour internationale sous pression

La CPI, Cour internationale sous pression
Par Stéphanie Maupas (La Haye, correspondance), Le Monde, 02 Jul 2013

L'accusation était retentissante. C'était le 27 mai, au terme du sommet marquant les 50 ans de l'Union africaine (UA). Pendant trois jours, les Etats avaient planché sur la meilleure stratégie pour contrer les poursuites engagées par la Cour pénale internationale (CPI) contre le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, fraîchement élu, lorsque le président en exercice de l'UA et premier ministre d'Ethiopie, Hailemariam Desalegn, a accusé la Cour de mener "une sorte de chasse raciale" contre les Africains.
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Parmi la trentaine de responsables poursuivis, Uhuru Kenyatta occupe une place particulière : le président kényan, élu le 4 mars, doit répondre avec son colistier, William Ruto, de crimes contre l'humanité pour des violences commises après l'élection présidentielle de décembre 2007. Le procès doit commencer à l'automne. L'Union africaine voit ces poursuites d'un très mauvais oeil. Dans une résolution, elle s'inquiète de la "menace" que ces actes d'accusation pourraient faire peser "sur les efforts destinés à promouvoir la paix et la sécurité ainsi que la primauté du droit et de la stabilité en Afrique". Uhuru Kenyatta fait l'objet de poursuites depuis 2010. Les pourfendeurs de la CPI voient dans son élection à la présidence un véritable référendum contre l'institution. Ses partisans, eux, assurent que les poursuites ont au contraire permis de tenir, cette fois, des élections dans le calme au Kenya.
Quoi qu'il en soit, le label "criminel de guerre" pèse sur Uhuru Kenyatta : ainsi le président américain, Barack Obama, a-t-il soigneusement évité la patrie de son père lors de sa récente tournée africaine. L'Union européenne, elle aussi, est embarrassée. Pourtant, lors d'une visite à Londres, le 7 mai, M. Kenyatta a été longuement reçu par le premier ministre, David Cameron. L'ancienne puissance coloniale ne souhaite pas ternir des relations diplomatiques et économiques fructueuses. Et personne n'a intérêt à susciter une crise politique au Kenya.
Uhuru Kenyatta "ne fait pas l'objet d'un mandat d'arrêt, il s'est toujours présenté devant la Cour", souligne Christian Behrmann, chargé pour Bruxelles des relations avec la CPI. Interrogé sur le risque de déstabilisation du Kenya, Christian Behrmann botte en touche... et invite à contacter l'organisation No Peace Without Justice ("Pas de paix sans justice").

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