Discours de Mme Hawa AhmedMinistre délégué chargé de la Promotion de la Femme, du Bien-être Familial et des Affaires Sociales, Djibouti

Discours de Mme Hawa Ahmed
Ministre délégué chargé de la Promotion de la Femme, du Bien-être Familial et des Affaires Sociales, Djibouti
Déclaration – Session plénière – Jeudi 3 février

 
Mesdames,
Messieurs,
C’est un réel plaisir de nous voir ainsi réunis aujourd’hui. La présence de tant de représentants de gouvernements, d’organisations, d’associations et de la société civile, de Djibouti, de la Corne de l’Afrique et de plus loin encore démontre, une fois de plus, que les Mutilations Génitales Féminines ne peuvent plus être occultées.
Quand nous avons décidé d’organiser cette Conférence à Djibouti, le doute était permis. Djibouti est un petit pays. Et, qui plus est, les mutilations génitales y touchent 98% des femmes, représentant toujours la première cause de mortalité maternelle et infantile. Face à ce constat accablant, il aurait été facile de baisser les bras, effrayés par l’énormité du travail à accomplir. Un travail de longue haleine, entamé de longue date, au travers des différents programmes mis en place par le Gouvernement et grâce à l’abnégation de nos partenaires de la Coopération. Un travail aux multiples facettes, aussi. Car lutter contre ces pratiques barbares, c’est aller à l’encontre de certaines conceptions traditionalistes. Est-ce qu’un aussi petit pays que le nôtre, avec une telle tradition des mutilations génitales, peut raisonnablement remporter un tel pari ? Je pense sincèrement que oui. Et cette Conférence en est peut-être la meilleure preuve.
En ouvrant les débats, nous nous étions fixé un objectif ambitieux, certes, mais finalement à la juste grandeur de notre volonté. Nous avions à cœur de balayer toutes ces fausses justifications qui voudraient laisser faire des pratiques dangeureuses et barbares, reconnues depuis longtemps comme inutiles et injustifiées. Et dans ce but commun, je pense pouvoir dire que nous avons réussi. Nous avons scellé la porte qu’auraient voulu enfoncer les manipulateurs de la Foi. Non, le Coran ne justifie pas la pratique des mutilations. Oui, les représentants religieux les plus influents se sont déplacés jusqu’ici pour en débattre. Non, la tradition ne cautionne aucunement les MGF.
Au niveau légal, même si la loi condamne fermement les mutilations depuis 1993, et la réforme de notre code pénal, il nous restait encore un cap à franchir. Et aujourd’hui, avec le Protocole de Maputo, c’est au niveau international, que Djibouti s’affiche hostile et engagé contre toute forme de MGF !A cet égard, le Protocole de Maputo offre bien davantage qu’un simple cadre juridique à notre action politique. Il représente une tribune internationale, grâce à laquelle les pays qui le ratifient peuvent s’afficher officiellement comme en guerre contre la barbarie des mutilations génitales. Surtout, il est un lien fort entre ces mêmes pays, réunis autour d’un objectif commun et revendiqué.
En ratifiant ce protocole, Djibouti rejoint le cercle encore trop fermé des pays qui ont franchi le pas. A cette heure, je vous le rappelle, 5 Etats l’ont ratifié (Djibouti non compris) C’est encore trop peu, mais la dynamique est là. Surtout, il est intéressant de noter que la moitié sont des pays qui appliquent le Droit Islamique. Comme quoi, il n’y a aucune incompatibilité à être un pays musulman – respectueux de sa foi et de ses traditions – sans accepter une quelconque attitude figée face à ce genre de pratiques. Il me semble que cette évidence doit être rappelée, en cette période où notre religion souffre d’une image parfois déformée.
Aujourd’hui, cette Conférence sous-régionale se présente un peu comme l’apothéose de notre lutte contre les mutilations génitales. Pourtant au cours des dernières années, le gouvernement de Djibouti n’est pas resté inactif face au fléau des mutilations. Dès 1993, le code pénal était révisé, pour punir sévèrement ces pratiques. Les initiatives de sensibilisation, toujours plus nombreuses, se sont multipliées, relayées par nos programmes de Santé et par les acteurs de la société civile et associative. Lentement, mais sûrement, les FGM deviennent un sujet moins tabou, les gens osent en parler. Nous assistons même à une reconversion massive d’anciennes exciseuses…
Ces deux jours de débats et le double consensus que nous visons viennent aujourd’hui consolider cet arsenal et je crois que nous pouvons déclarer que, maintenant, nous avons tous les instruments de réussite en main. Jamais nous n’avions été aussi bien équipés. Reste maintenant la dernière touche… Car bien sur, le combat contre les MGF ne s’arrêtera pas avec cette Conférence. La lutte à mener doit se livrer au quotidien, avec nos partenaires de terrain, au plus proche de la population. C’est une bataille de longue haleine que tous, ici présents, sommes bien décidés à mener et à remporter. Et ensemble, unis, nous y arriverons !
Pour votre présence et votre participation si précieuse, Mesdames, Messieurs, je vous remercie.